Frédérique de Butine - Un retour important à la Terre, même en ville.
Aujourd’hui, j’ai à coeur de vous présenter Frédérique, la co-fondatrice de Butine et Fugace.
Frede est l'une des merveilleuses humaines que j'ai eu la chance de rencontrer au travers de mon aventure chez Trois fois par jour. Directrice artistique de profession, Frede, accompagnée de deux autres cofondateurs, fait naître Butine, un projet de coeur qui a pour mission de ramener à la nature en mettant de la vie sur les terrasses urbaines.
"La nature a toujours eu une place importante dans nos vies à Raph, Mée et moi. L’effervescence de la ville est aussi vivifiante qu’essoufflante souvent, en tout cas pour moi. Je crois que mettre les mains à la terre, mettre de l’amour dans notre espace extérieur pour en faire un endroit où on se sent bien, et prendre soin de quelque chose qui ne poussera pas plus vite, même si tu le veux fort fort, amène un espèce de lâcher prise apaisant."
Parles-nous un peu de la création de Butine et de ton cheminement intérieur pour en arriver à concrétiser ton idée.
Je parle un peu plus de la création de Butine à la question suivante, par contre je trouvais intéressant d’aborder le sujet du cheminement intérieur. Je crois que dans le cas de Butine, je le vois un peu plus comme un (autre) projet que comme une entreprise à part entière. Je crois que cette perception vient surtout du fait que Butine n’est pas quelque chose que nous faisons à temps plein en plus d’être très ponctuel dans le temps (saisonnier). C’est un projet que nous faisons tous en parallèle de nos emplois temps plein, c’est pourquoi je crois que je n’ai jamais eu le feeling d’être une «vraie» entrepreneur, mais plutôt que c’était un autre «truc trippant» à faire entre amis, dont on n’a jamais eu l’intention que ça paye les bills (et une chance haha).
Quel a été le déclic de la naissance de cette grande idée?
D’abord, il faut dire que je ne suis pas seule dans ce projet, nous sommes 3. Trois co-fondateurs, trois à mener ce projet de front années après années, mais avant tout trois amis. La genèse de Butine était autour d’un verre, alors que Mée et moi avions étonnement exactement le même problème au même moment. On cherchait sans succès des jardinières locales et jolies pour les logements dans lesquelles nous venions tout juste d’aménager. C’est à ce moment que nous nous sommes dit que ce pourrait être intéressant d’en faire, d’abord pour nous et tant qu’à y être, plus les autres aussi. Elle en a parlé à Raph, notre ami commun, designer industriel, pour savoir si ça l’intéressait. Et puis, quelques mois plus tard, on se lançait.
Quelle est ta mission, ta vision, ton aspiration profonde au travers de ton entreprise et dans la vie en général?
Tenter le plus possible de rester fidèle à nos valeurs environnementales, malgré la multitude d’options souvent plus simples et moins onéreuses qui se présentent à nous, mais qui sont souvent moins alignées avec ce que nous désirons offrir. Être trois dans une entreprise «bonbon» amène aussi son lot de difficultés au niveau des attentes, des processus, des timelines. On cherche constamment un équilibre pour nous permettre que ça ne devienne pas un fardeau supplémentaire au day to day, tout en respectant nos engagements auprès des notre clientèle. C’est un apprentissage constant sur nous-mêmes, mais aussi sur les limites des autres.
En plus de ton entreprise Butine, tu as également créé le projet Fugace il y a quelques mois. Que représente t'il pour toi?
Fugace n’est (ou n’était) qu’une excuse pour explorer et créer, sans restriction de temps et d’attentes. C’était une façon, pour moi, d’essayer de nouvelles choses, d’expérimenter et de les partager. De créer une discussion et de parler en quelque sorte sur le processus créatif certainement pas linéaire. Lorsqu’on travaille en création, on est confronté à des attentes et des «standardisation» du processus créatif, qui nous obligent à livrer en un temps donné quelque chose qui peut prendre beaucoup moins ou beaucoup plus de temps selon énormément de facteurs, intérieurs et extérieurs à nous, ce qui peut déclencher énormément de stress. Fugace est une façon d’apaiser ma relation à la création, en me permettant d’essayer sans pression de nouvelles choses dont le résultat, autant bon que mauvais, est aussi valable l’un que l’autre. Il m’a permis, pendant la pandémie, d’avoir un but sans que le chemin ne soit tracé d’avance. Le nom n’a d’ailleurs pas été choisi au hasard. Fugace, qui signifie «Dont la durée est brève et qui disparaît brusquement.» représente exactement ce que c’est. Lorsque je crée et partage un produit, il se peut que ce soit la seule et unique fois que j’en fais, selon mes envies, ce sont de petites collections éphémères. Le projet est tout aussi fugace, car je ne me mets pas la pression de devoir créer et partager à tout prix. C’est un espace exutoire, où selon le temps et les désirs que j’ai, je peux retourner pour explorer.
Tu exerces également le métier de directrice artistique? Comment arrives-tu à combiner tes beaux projets au quotidien pour les rendre épanouissants dans ton coeur?
Ouf, ce n’est pas sans embûches. J’aime être occupée, visiblement, mais j’apprends encore tous les jours à mettre mes limites qui ne sont pas toujours claires, même pour moi. Cette année avec Butine et mon emploi, j’ai fait une pause pour Fugace, justement parce que je désirais que ce projet reste léger et doux pour moi lorsque j’y reviendrais. La consolidation Travail-entreprise m’oblige certainement à faire des sacrifices de temps que je trouve parfois difficile. J’ai une relation très bitter-sweet avec mon désir de faire mille choses qui m’amène énormément de fierté, mais qui souvent me pousse plus loin que ce que je suis capable de prendre.
Il est évident en te côtoyant que l'humain et la conscience ont une place centrale pour toi? Comment définirais-tu la conscience en affaires, selon ton cœur et ta vision?
Je crois que peut importe ce qu’on fait dans N’IMPORTE QUELLE sphère de notre vie, l’humain est la chose la plus complexe. On oublie souvent que au-delà des échéanciers, des livrables, des chiffres et des processus, il y a des gens qui vivent, réagissent et ont des perceptions complètement différentes de nous. C’est l’apprentissage d’une vie que de déconstruire le fait que ce qui peut être une évidence pour nous, ne l’est pas nécessairement pour l’autre, et que malgré les embûches qu’un travail d’équipe peut engendrer (parce que ce n’est évidemment pas toujours évident) il est important de rester doux et sensible aux autres. La communication étant la clé pour nous permettre de respecter nos limites, tout en respectant celles des autres je crois.
La notion de retour à la terre même dans un milieu urbain transparaît beaucoup dans le projet Butine. Qu'est-ce que tu souhaites que les potagers urbains apportent aux humains qui les utilisent?
La nature a toujours eu une place importante dans nos vies à Raph, Mée et moi. L’effervescence de la ville est aussi vivifiante qu’essoufflante souvent, en tout cas pour moi. Je crois que mettre les mains à la terre, mettre de l’amour dans notre espace extérieur pour en faire un endroit où on se sent bien, et prendre soin de quelque chose qui ne poussera pas plus vite, même si tu le veux fort fort, amène un espèce de lâcher prise apaisant.
Quelle est ta vision du futur pour ton entreprise?
Je crois que Butine vivra tant et aussi longtemps qu’on aura du plaisir à le faire. Comme je le mentionnais plus haut, nous ne faisons pas vraiment d’argent, la seule rémunération étant la fierté et le plaisir. Le jour que nous perdrons ça, ce sera la fin.
Dans ton parcours de création d’entreprise, quels sont les plus importants défis que tu as rencontré et quelles solutions as-tu trouvé pour rester motivée?
La pandémie a sans doute été le plus gros obstacle pour nous, malgré le fait que 2020 et 2021 ont été sans aucun doute nos meilleures années sur un point de vue strictement de ventes, ça a aussi été des années où il nous fallait dealer avec les limites de chacun face au virus, dans une entreprise dont le but premier était de faire quelque chose ensemble. Dans notre cas à nous, on attend que ça passe en communiquant le mieux possible pour nous assurer que chacun de nous est toujours bien et épanouie avec le rôle, les tâches et les responsabilités qu’il ou elle a dans l’entreprise.
Si tu avais à donner un conseil à un entrepreneur en démarrage, quel serait-il?
Je crois qu’on a faussement l’impression que lorsqu’on lance notre entreprise, que ce sera un succès instantané et je sens qu’il y a souvent de la déception en voyant que ça ne «lève» pas autant qu’on aurait cru. La réalité c’est que c’est souvent (très) long avant de se faire connaître assez pour arriver à atteindre nos attentes, et c’est pour cette raison qu’il faut aussi choisir quelque chose qui nous passionne, car dans les premières années, je crois qu’il est important de récolter une rémunération qui n’est pas nécessairement monétaire.
Pour en savoir plus sur Butine et Fugace, c’est ici:
https://www.butine.ca/
https://www.boutiquefugace.com/